La musicologie est-elle une affaire personnelle ou une affaire collective ? Une telle question ne peut que faire référence à la philosophie. Philosophie et musique constituaient souvent deux champs disciplinaires attachés l’un à l’autre. Toutes les deux sont fondées sur la réflexion, sur la spéculation, sur l’art et sur la création, et même si elles ont un point de divergence, faute de différence disciplinaire, elles sont complémentaires en tant que pensées créatives. L’aventure du chercheur musicologue a révélé sa double et contradictoire aspiration : une aspiration vers la collectivité et l’universalité et une aspiration vers la singularité et l’individualité ; mais il restera autant attaché à son intime singularité, et en même temps à ce qui l’unit à l’altérité.
L’acte musicologique est un sujet d’intérêt d’un ensemble de chercheurs dans un cadre bien déterminé. Il est aussi le centre d’intérêt d’un chercheur traitant individuellement d’un genre musical. La distinction fonctionnelle entre les deux statuts de chercheur se caractérise par une divergence en termes de problématiques, de moyens financiers et de liberté intellectuelle. Ceci dit, la recherche de genre collectif converge vers une cible bien décidée, tracée par l’ensemble des chercheurs ou plutôt du directeur de recherche qui commande et dirige à la fois l’équipe et le projet. Nul ne peut en dévier. Cela veut dire que l’idée du directeur de recherche doit être respectée avec une intégralité presque certaine.
En revanche, lorsque les résultats émanent d’un chercheur traitant un genre de musique à travers une vision individuelle, cela permet un aspect personnel à cette recherche. Le cas échéant, cela permet au chercheur d’avoir ses propres problématiques, pensées, stratégies, méthodes, concepts et approches. Si les travaux collectifs s’occupent d’un champ de recherche très vaste, qui demande des moyens financiers énormes et une disponibilité certaine, la recherche individuelle ne peut plus dépasser ses propres limites en termes de moyen et de période. Néanmoins, les résultats ne doivent jamais être déterminés par les moyens et les conditions. Cela veut dire que, face aux difficultés de l’entreprise musicologique, déjà connues jusqu’à présent, le musicologue doit se dévouer pour un militantisme1 scientifique.